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Sire, je n'ai pas eu besoin de cette hypothèse

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Ce texte participe à l'activité : Vis ma vie

Ce texte s'inscrit dans la proposition d'atelier de novembre 2022, par Fabien Chabosseau, sur le thème "vis ma vie". Pour en comprendre tout le sens, mieux vaut préalablement découvrir la proposition de Fabien en cliquant ici !

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Si je n’étais fondamentalement dans le doute de l’agnosticisme, je me rangerais, sans l’ombre d’une hésitation, aux propos de Pierre-Simon de Laplace. Sire, je n'ai pas eu besoin de cette hypothèse ! répondit-il à un Napoléon s’enquérant de sa dévotion, de sa croyance en l’existence de Dieu.

Mais pour faire preuve d’un tel apatheisme, à quel Napoléon m’adresserai-je ? Pour quelle divine cause ?

*     *

Tout commencerait, trop confidentiellement il est vrai, dans un espace étrange, virtuel, cercle d’expression et lieu d’écriture à la fois. Où la joliesse de bons mots côtoient l’affligeante obscurité d’écrits sans inspiration ou sans rigueur, où le concetto (l’apophtegme, peut-être) s’efface devant de beaux traits d’esprit. Un espace bien éloigné d’un Café Rouge, où l’illumination verbale ennoblit de vibrants témoignages ou d’émouvantes ferveurs, où la bienveillance fustige la rosserie !

Tout commencerait par la provocation d’un esprit étrange et insondable, celui d’Èfsé, mi-dieu des mots mi-homme de la perfidie ; dirai-je, à demi-mot, que, par quelque pouvoir tendancieux, par l’androgynie de son regard amusé, tel esprit penserait vous envoûter au point de vous embastiller dans un infernal dualisme de genres stéréotypés ?

 

*     *

Et pourtant... tout commença, de fait, ainsi ! Que ne voulut-il pas transformer, d’un coup d’érection magique, tout hétéro masculin, nécessairement et primairement salace, donc « ordinairement imbécile et excité » à la vue de ses fantasmes mamelaires, en poupée avisée ? Et toute hétéro féminine, nécessairement beaucoup plus vertueuse, donc « ordinairement amusée et distante » à la vue d’un macho bite-à-pattes, en matador exacerbé !

L’homme, soit le gros dégueulasse dont le cerveau se limite aux seuls noyaux gris centraux, face à la femme, soit la délicate égérie dont le cerveau est tout cortex, associé à des fonctions supérieures.

Le slip ostentatoirement tendu contre l’hésitante et jolie petite culotte pondérée et mutine à la fois.

ARGHHH !

Oui, il y a des hommes prompts à la soumission, parfaitement abêtis et convaincus de la supériorité de LA femme, certains d’être profondément prévisibles à l’esprit de celle-ci.

Oui, il y a des femmes capables de hurler la revanche ou le besoin d’humilier L’homme ! Ou de provoquer les esprits rabougris en écrivant Le génie lesbien, en jouant l’Ode aux clitoris.

Oui, il y a de vrais porcs et de vraies salopes, et des putes au masculin comme d’innommables cougars !

Oui, il y a mille autre « Oui, il y a… ». 

Mais enfin… Oui, il y a TOUT le reste, surtout ! Dont le « Oui, il y en a tant qui vivent simplement, honnêtement, amoureusement, respectueusement, si loin de ces comportements-là » ! Il y a surtout, chez qui pense, le chacun/chacune qui nous habite tous, que tous ne voient pas, que beaucoup comprennent, que certain.e.s cultivent pour en extraire le meilleur et devenir « humains ».

Auprès desquels je veux me ranger, je tente de le faire ! Alors, « Èfsé, je t’en conjureje n'ai pas besoin de ton hypothèseparce que je ne suis pas une hypothèse, et pourtant… je suis ! ».

Je suis ? Oui, féminin, autrement que dans ce cliché qui ne représente rien de la grandeur des femmes qui vivent à mon esprit.

Je suis ? Oui, masculin, autrement que dans ce stéréotype qui n’honore en rien la dignité des hommes auxquels j’essaye de m’assimiler.

Je suis ? Oui, humain, exactement comme l’indicible m’a fait, porteur sans gêne des gènes des deux sexes ! Qui puis-je ?

Mais humain aussi par l’envie d’explorer l’infini des possibles d’un cortex qui m’est donné. Lourde mission de tout instant, mais jaculatoire, d’une bien plus grande extase que tout gémissement orgasmique. Humain donc je veux rester… c’est si dur d’y parvenir !

Et qu’importe si je bande parfois, cela est diversion, amusement, ou gêne quelquefois quand le contrôle est en vadrouille. Mais cela indique sans doute que je suis probablement un homme, à ce qu'il se dit. J'hésite car je ne me suis jamais posé la question de savoir "comment être ? " et à plus forte raison "comment être un homme ? " ! Je n'ai pas eu la sensation non plus qu'ados, ou jeunes gens, nous (copains, copines et moi) nous ayons fait de cela des problèmes. Nous étions, nous sommes devenus ; nous aimions, nous nous sommes battus... pour aimer comme la nature (très bonne conseillère, si ! si !) nous a dit d'aimer, avec des larmes, des palpitations, des mensonges et des mises à nu, et pas seulement qu'au figuré.

 — Ah ce bon vieux temps, tellement plus...

—  OH ! Ça ne va pas, non ? STOP ! C'est quoi ces conneries de bon vieux temps ? C'était un temps aussi pourri qu'aujourd'hui en bien des domaines, non ?

—  C'est vrai, je m'égare. J'arrête de dialoguer avec... moi, et j'en reviens au sujet !

Donc, disais-je, sans céder aux "obligations" d'appartenance, par falsification ou par similitude des apparences, des attitudes et des modes, sans besoin d’assimilation ni de mimétisme de façade, je suis heureux de cette banalité d'homme qui m’habite, parce que j’admire la banalité de l’humain quand il honore sa place au naturel dans ce monde qui ne lui appartient pas. J’honore les hommes qui aiment les femmes, et leur femme, ou leur homme, et les hommes en général. J’honore les femmes qui aiment les hommes, et leur homme, ou leur femme, et les femmes en général. Tout autre m’indiffère, seul moyen que j’ai de le remettre à sa place, ou de ne pas hurler face à la médiocrité que tant cultivent, quand il y a tant à faire par ailleurs !

Èfsé est un esprit taquin ; il sait tout cela, il essaye, il teste, il s’amuse, il provoque. Mais comment imaginer être, pour lui être agréable, tout ce que l’on refoule par aversion profonde ? Comment s’urbaniser dans l’ennui des bars et du paraître quand la terre vous accroche aux mains, par choix… quand la Terre et la Vie vous happent dans la complexité de leurs splendeurs ? Devrais-je devenir porte-étendard d’un masculinisme ridicule, d’un féminisme qui peut l’être tout autant ? Alors que l’humanisme est déjà si lourd à universaliser ? Ou devrais-je simplement m’amuser à le faire croire, le temps de quelques lignes ? J’en suis bien incapable ! D'autres le feront, et mieux que moi, car...

Évidemment que les femmes vont au Café Rouge pour décompresser ! Pour rire de ceux qu’elles prétendent détester, où quelles détestent vraiment, comme si la moquerie pouvait rendre intelligent, témoigner d’intelligence !  Évidemment que les hommes s’y retrouvent pour mâter, parader, draguer, se vanter, se jauger, verres d’alcools forts en main ! Que, contrairement à toute femme, tout homme, et la règle est bien connue, ne rêve de vacances que sur la Costa del Coco ou sur la praia d’Ipanema ou celle de Copacabana ! Que tout patron ne voit en toute dame ou demoiselle sous son joug que du baisable ou non, et au mépris de tout travail réalisé puisque le cul passe obligatoirement avant la rentabilité ! Que tout mari n’imagine épouse que comme odalisque du sérail dont il est prince ! Et donc, par conséquence, que l’homme qui mate est nécessairement ridicule, même quand une profonde timidité anéantit en lui toute autre stratégie de séduction ! C'est vrai, quoi ! Restons digne ! S'il veut mater, qu il se planque derrière son écran et on n'en parle plus, non mais ! D'ailleurs ce n'est pas un hasard si seuls les hommes sont réputés branleurs.

Mais, Èfsé, peut-on imaginer que c’est son mec qui a plaqué la colérique et capricieuse Bettie ? Que c’est le patron qui n’a pas renouvelé le contrat de l’apathique Marie, jamais très à l’heure et si souvent trop tôt partie ? Que Samuel n’a pas de petit nom, contrairement à Ludivine que tout le monde appelle Diva, ce qu’elle adore, puisqu'elle ne supporte pas de ne pas être au coeur de toutes les attentions ? Que ladite diva fulmine de ne pas avoir pu ce soir-là se taper quelque musculator, et que le pauvre Samuel, une fois de plus, a vu partir, indifférente et hautaine, celle qu’il aimerait tant avoir tendrement comme épouse ?

Peut-on oser croire qu’en toute basse-cour, l’homme ne devrait être qu’humble, discrètement élégant, posé et réservé, sous peine d’être coupable d’outrecuidance ? Qu’en toute bergerie il n’y a que mâles infidèles, arrogants et irrespectueux ? Mais alors… pourquoi les sales gosses, ou tant de durs, gangsters et autres coupe-jarrets, ont leurs groupies, leurs inconditionnelles dévotes du simple fait qu’ils sont voyous ? Pourquoi l’argent ostentatoire rend autant séducteur n'importe quel ordinaire ou laideron ? Pourquoi face à tout cela ne pourrait-on aussi avoir mépris et dégoût ?

OUPS ! Digression ? 

Alors, merde, je vais me faire lyncher ? Voilà que je prends cause pour l’orphelin, non pour la veuve ? Vieux con d’un autre temps que je suis ? Qu’en sait vraiment qui.el me lit ? Tant pis, j’ose !

« Mais après tout… c’est ta faute Èfsé, tu me mets à rude épreuve ! Je sais bien ce qui trotte en ton esprit par aussi vive provoc. Ton invite est une “vis ma vie” non échangiste entre HOMME et FEMME, évidemment. Tout serait si simple s’il n’y avait que ces deux-là ! Petit plantoir et pot de fleur, ou vice versé, soixante-neuf si l'on veut, sans dieux, sans Dieu, sans l'Histoire, sans culture ni idéologie ! C'est un plaidoyer pour des causes que tu connais sans doute et veut dénoncer. Note, puisque je suis dans cet espace étrange et virtuel, cercle d’expression et lieu d’écriture à la fois, que j’assume quand même ma présence : j'y réponds... autrement. Je n’ai su faire autre puisque je fuis les Café Rouge. Je suis d’un autre monde, différent, sur d’autres causes, qu’elle en moi défend tout autant que les lui en elles de ces compagnes de lutte dont je croise les bannières si souvent. Pardonne de ne pas avoir cette fois « joué » la règle !

Mais à bien y penser… la liberté si chère et si chanceuse que nous avons, ailleurs si cher et si mal chancée, n’est-elle pas d’amender, de défier ou d’upcycler (putain de manie de chercher toujours ailleurs de nouveaux mots pour faire… branché !) les règles, jusque dans les Mascareignes (souvenir !) ? Merci Èfsé ».

Que conclure ?

Honte aux machos, vive(nt) les machas ?

Ou pas !

 


Publié le 01/11/2022 / 3 lectures
Commentaires
Publié le 01/11/2022
J'ai bien ri et je ne sais pas vraiment pourquoi. J'ai commencé à entendre des voix après le "Aaarg" sur les 4 "oui". A partir de là, j'ai entendu un drôle qui s'exclamait debout sur une table rustique dans un estaminet au cours du 17e siècle. Ensuite des inserts de mots très très contemporains ont encore ajouté à mon hilarité. Au début, j'ai voulu décoder mais après la recherche du sens du troisième mot inconnu, j'ai stoppé. Lire le monde diplomatique, est une récréation à côté des tes phrases. Donc, j'ai continué à la barbare ou comme un skieur qui se prend une porte sur deux, mais je suis quand même arrivé à l'arrivée et je crois avoir compris, un peu confusément, de façon diffuse, l'idée. Et je crois que je suis assez d'accord mais je n'oserais le jurer ! Merci beaucoup ! J'ai apprécié !
Publié le 02/11/2022
Merci Louis :-) À dire vrai, quand j'ai vu l'atelier de novembre proposé par Fabien (le Efsé de mon texte), j'ai failli laisser tomber car franchement je n'avais pas un soupçon d'inspiration pour me mettre dans la peaux d'une fille "bien roulée" en quête de respect et de liberté sexuelle ! Mais en lisant et relisant les postulats proposés, je me suis dit que m'exprimer sur le sujet autrement pouvait avoir un sens. Et voilà ! Après, la manière dont c'est abordé vise à valoriser l'humain plus que les genres, évidemment, ce que tu as parfaitement compris. Quant à l'usage de mots moins connus, tu as raison de passer outre car leur sens se devinent de toute façon dans leur contexte :-)) Si tu as lu ma participation à l'atelier sur les robots, tu as vu que je peux aussi écrire avec un vocabulaire 100% habituel :-)) En tout cas, si je t'ai fait sourire, ici, alors ça me va. Merci
Publié le 04/11/2022
Bonjour Jean-Luc, et merci de ce texte, vraiment. J'aime les animaux. Ce que je veux dire c'est qu'il ne me viendrait jamais à l'idée de prendre un fusil pour en tuer un. Et pourtant, je préfèrerai toujours le bon chasseur au mauvais écolo. Cet atelier, dans ces deux textes (voulus bien sûr à charge, tu l'auras identifié, avec des lignes attendus et délibérément délavé par les lieux communs),a pour but de casser les idées reçues, de sortir des poncifs machistes ou féministes. Tu as mis le doigt dessus avec ce brio que j'apprécie chez toi, l'acide mêlé à la vérité crue. L'absurdité sociétale et stigmatisante git dans la mélasse manichéenne de la pensée que les lobies ont crée pour nous, moutons d'un Panurge dépassé. Bien sûr qu'avant n'était pas mieux qu'aujourd'hui. La seule différence, c'est qu'avant les dieux Internet et réseaux sociaux n'étaient pas là pour souffler le vrai comme le faux sur nos conscience influençables. Merci l'ami.
Publié le 05/11/2022
Nous sommes profondément sur la même longueur d’onde, Èfsé :-)) De manière étonnante d’ailleurs quand tu fais allusion à l’animal, l’écolo, le chasseur. En effet, je suis formé à l’écologie scientifique, et j’ai enseigné durant 22 ans ses fondements à de futurs garde-chasses et techniciens des fédérations de chasse, alors que j’ai une réelle aversion de la chasse. Contre mes préférences, j’ai choisi d’agir sur le ver pour préserver le fruit, et donc en quelque sorte accepter de tuer l’animal pour préserver la faune. Rude école, mais si importante à mon esprit pour lutter contre l’hypocrisie qui guette chacun de nous. Habité par l’écologie, je ne suis pourtant pas écolo car je sais trop combien d’entre eux n’ont aucun bagage en écologie, souvent même encore moins que les chasseurs, c’est dire (car eux, tout bêtement, ont souvent des connaissances réelles de terrain) ! Grand merci, en tout cas, Fabien. Juste un mot encore sur le « souffler le vrai comme le faux » qui ferait un formidable thème d’écriture. Nous vivons la mort certaine de cet attribut du langage (allusion à Thomas Hobbes) depuis que nous acceptons que des résultats d’élection démocratiques bafoués aux plus hauts niveaux, que des pourritures humaines réécrivent l’histoire en en effaçant les fondements et les repères, qu’un enfant puissent être suicidé par des pseudonymes haineux ou bêtes. Mais le bon vieux temps portait déjà ces germes-là. Ainsi m’a grand-mère s’est-elle pendue, épuisée par les rumeurs (sur la mort de son époux) véhiculées par le pire internet de l’époque : le commérage ! Me privant de la connaître.
Publié le 05/11/2022
c'est tout à fait cela Jean-Luc. Ce ne sont pas les idées qui sont dangereuses, ( a-t'on encore le droit de penser selon son libre arbitre?), mais l'utilisation, le rattrapage systématique qui en est fait dans cette société surmédiatisée où le faux-cuisme est légion, Où l'on ne sait plus comment agir et parler sans s'attirer les foudres des mouvements lobistes bien pensants. Merci de nous faire partager ton intime.. J'ai la force de penser que nous sommes bien des "frères humains" envers et contre tout dans une drôle de "balade des pendus". Oui ce sujet pourrait faire thème pour un atelier. Et je te conseille d'en toucher deux mots à Léo et de le lui proposer. Je suis sûr qu'il y sera sensible. Bien à toi l'ami.
Publié le 09/11/2022
Je sors d'un tourbillon professionnel éprouvant mais très plaisant, et me voici plongé dans une nouvelle forme de tornade, littéraire cette fois, la tienne. Ta démonstration en oeil du cyclone qui dévaste tout sur son passage, à commencer par les raccourcis et les absurdes étiquetages dont l'humain mais surtout la société raffole tant. Cette succession de style et de genre balaye et emporte avec elle de nombreux clichés : ça fait des dégâts mais comme c'est pour mieux reconstruire derrière... je suis autant fasciné que peuvent l'être les chasseurs de tornades qui s'approchent de ce qui leur échappe totalement, dans l'espoir d'en avoir la pleine maîtrise un jour. Et tu u me surprend toujours par ton angle d'approche, toujours mûrement réfléchis. Tu es un phénomène Jean-Luc, merci de toi, comme disait l'amie Gisèle Prévoteau, du précédent site.
Publié le 10/11/2022
À ces moments de bourre totale, je connais avec les échéances de bouclage de revues ! Alors je comprends parfaitement ta situation ;-) Si je tiens à publier sur le présent site des textes plutôt aboutis ou des propos murement réfléchis, c'est que j'écris beaucoup professionnellement par ailleurs (plus pour longtemps !). Du coup, dans mon esprit, tout texte mis à la vue de tous doit être soigné, pensé et "propre" :-)) En tout cas, je te remercie infiniment de ta lecture et du regard très (trop) élogieux que tu portes sur mes écrits. As-tu lu l'échange ci-dessus que j'ai eu avec Fabien ? Un atelier sur le vrai et le faux (souffler le vrai comme le faux) ce serait pas mal, un jour, non ? Qu'en penses-tu ?
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