Variations sur Vénus
J’oublierai tout de toi. La nudité, les fards,
Tes pâleurs de morte ressuscitée chaque soir
Les jouissances d’une jeunesse stupide et viciée,
Nos ardeurs stériles et ta beauté fanée
Nos larmes et nos humeurs sèchent dans le feu des mots
Pleurs et gémissements ne sont que des échos
Deux par deux, mes vers vont comme des points de suture
Le long de la plaie faite, au cœur, par la rupture
J’ai perdu la piété que j’avais pour Vénus
Déesse et substitut des faux dieux déchus
Déjanire jalouse, mit le sang de Nessos
Sur l’habit qui brûla Héraclès jusqu’à l’os
Et tout comme l’Alcide, je fus empoisonné
D’un amour infecté par les anciennes plaies…
Elle était à ravir, mais elle me ravissait
Nos rêves prenaient corps ; l’amour les ficelait
Nous habillions le vide ; mon sexe aiguillonné
Recousait les plaisirs que la vie décousait
Mais j’ai tout perdu de ce fantasme naïf,
Sauf l'éclat cristallin de ce corps maladif
J'aimerais l’oublier tout à fait ; le désir
Brouille encore le passé avec l'avenir
Et la lune, en faisant son signe du cornu,
Dans les nuits de sabbat, convoque son corps nu
Que les vers dévorent cette goule muette
Qui me susurre encore qu’il faut que je regrette !
Et m’attire… Quand tous les chemins se vaudront
Prendrais-je de nouveau la voie de sa maison ?
Elle serait là comme un squelette d’oiseau
Belle, rare, dure, blanche… et en mille morceaux