Le matin, après s’être posé en douceur, l’avion a fini par s’immobiliser sur la piste. Je ne comprends jamais rien de ce que les hôtesses de l’air peuvent raconter dans leur micro alors, pendant que les haut-parleurs nasillaient, j'ai fait comme d'habitude, j’ai regardé ce que les autres faisaient et j’ai fait comme eux, déboucler ma ceinture et me redresser pour récupérer nos affaires, mon sac à dos et la valise, assez lourde quand même, d’Ana. Debout, dans un équilibre précaire, mon regard a été happé par l’image de Barbara, seule encore assise, insensible à l’agitation générale. Elle a relâché ses cheveux et s’est penchée un peu avant de tourner alternativement la tête de droite à gauche et de gauche à droite. Sa chevelure m’a laissé voir, le temps d’un battement de cil, la fermeture d’une chaîne en or qu’elle portait autour du cou. J’en ai été ému comme s'il s'était agi de l’ourlet d’un bas nylon subrepticement aperçu. Ce n’est pas ce qu’on voit qui nous enivre, c’est de le voir à la dérobée. Elle a appliqué du rouge sur ses lèvres, a prononcé quelques "p" mystérieux et puis s’est tournée vers nous.