- Maupuis, es-tu là ? Arrête maintenant, ce n’est pas drôle ! Dit-il d’une inquiétude non dissimulée.
Les battements de son cœur redoublaient d’intensité. Comme pour lui rappeler ses premiers jours en prison, là où la peur le suivait jusque dans son sommeil. Ne fermant que très peu l’œil de la nuit, de peur d’entrevoir l’horreur sous toutes ses formes.
- Gardiens ! Hurla-t-il, il vous a promis quoi le vieux ce soir ? À part se foutre de moi?
- Maupuis, si je t’attrape ça ne me dérangera pas de rallonger ma peine.
Le prisonnier jeta un œil dans la cellule de gauche, et ne trouva personne, la porte était entre ouverte sans trace de l’occupant. Un lit vide, avec des draps encore chauds, complétement chiffonnés comme si la personne venait à peine de quitter son lit. En passant sa main à l’intérieur des draps, il n’y trouva qu’une chaussette noire. Rien d’intéressant à prendre. Pourtant, Tony l’occupant de cette cellule était réputé pour avoir toujours une lame tranchante sous ses draps. Une protection contre les mauvais penchants des gardiens bourrés abusant de leur autorité et des spiritueux. Il avait sans doute dû la prendre en quittant sa cellule. À moins qu’un maton ne lui ait confisqué.
L’unité 3 en treize ans n’avait jamais été aussi vide, les dix cellules avaient été vidées de ses taulards.
- Auraient-ils été emmenés dans une autre unité ? S’interrogea-t-il. Ou bien jeté dehors ? Comme des chiens lorsqu’ils refusent d’obéir.
Une partie de lui pensa à un mauvais jeu des matons pour épicer leur vie sordide. Où le seul plaisir est de se venger sur eux.
Un claquement de porte se fit entendre du côté de l’unité 2, là où se trouve les plus dangereux de la prison et le secrétariat des matons. Dans le couloir, des bruits de pas à un rythme régulier s’intensifient avec quelques messes basses à peine audibles. Les pas s’arrêtent tandis que d’autres arrivent, comme si plusieurs personnes venaient d’entrer. Les bruits de chaussures étaient différents de ce que l’on pouvait entendre habituellement, ils étaient semblables à des bruits de bottes.
Un cri d’effroi retenti en même temps qu’un éclat de verre. Des coups sont portés contre un mur. Le cri laissa place à une sorte d’étranglement et d’un spasme d’appel à l’aide.
- A A l’aide aah.
Un profond silence régna. C’était presque pire que de ne plus rien entendre. Se demandant en boucle si cela était bien réel. Ne sachant pas quoi faire à part survivre. Mais survivre à quoi ? Le tumulte de la vie était déjà bien trop lourd à porter au quotidien sans rajouter ce cri d’effroi qui tourne dans sa tête sans s’arrêter, un sentiment de terreur l’envahi. Incapable, à cet instant de bouger, des gouttes de sueur perlent sur son front et son ventre commença à gargouiller. Une partie de lui voulait s’enfuir, une autre mourir, et une autre restait là complétement immobile, doublement condamnée.
- Alarme intrusion enclenchée système de sécurité code 3. Alarme intrusion [..].
Le déclenchement d’un message d’intrusion, sorti le prisonnier de sa stupeur.
- Vite, je dois en avoir le cœur net, voir ce qui est arrivé. Car ne rien s’avoir et imaginer sont encore bien pires.
Marc couru le long du couloir de l’unité 3 afin de rejoindre l’unité 2 sur sa droite. En s’avançant prudemment vers les portes de sortie de secours, elles s’ouvrirent, donnant sur une mare de sang et des débris de verre. Le secrétariat du pénitencier avait été impacté. Les bruits depuis l’unité 3 émanaient de cette zone.
- Maupuis !? Non ! Pas toi…Hurla un surveillant pénitencier qui saisit immédiatement son talkie-walkie.
- Alpha 5 pour Charlie Maupuis a été tué, il baigne dans une flaque de sang. Contactez immédiatement la police, l’alarme anti-intrusion s’est déclenchée. Je n’arrive à joindre personne et je suis seul dans l’unité 2. Il se passe quelque chose d’anormal. Vite !!!
Marc s’avança près du surveillant et s’agenouilla à sa hauteur afin de constater l’état dans lequel Maupuis gisait.
- Zzzzzz Charlie pour Alpha 5 reçu zzzzzzz terminé.
- Quoi ? S'étonna-t-il, je ne reconnais pas la voix à la radio. Putain, ce n’est pas possible, c’est un cauchemar.
Il balança sa radio à travers le sol, qui s’explosa en deux.
- Mais pourquoi tu as fait ça ? C’était notre seul moyen d’avoir de l’aide ! Dit-il déconcerté.
- Soulève Maupuis, tu vas comprendre…
Marc essaya de retourner le vieil alcoolique plein de sang sur le dos. Lorsqu’il vit avec effroi que la moitié de son visage ainsi que sa chair avait été déchiquetée. Il prit la poubelle sous le bureau et vomi à plusieurs reprises, n’arrivant pas à se contrôler.
Gabriel retourna les caissons de son bureau et ceux d’à côté, à la recherche d’une arme.
- Comment on va faire ? Je ne sais même pas contre quoi je vais me battre. Boulot de merde. Je ne vais pas aller loin avec deux tasers.
- Tiens vomito, prends-le et garde-le avec toi. Il lui jeta à ses pieds.
Gabriel monta sur une chaise et souleva le faux plafond, il y saisit une boîte dans laquelle était rangé un pistolet chargé. Il le glissa dans la une des poches de son pantalon.
Marmonnant dans sa barbe – J’ai toujours su que cela me servirait.
Marc prit appui contre le mur et ferma les yeux quelques instants. Il n’aurait jamais cru penser cela, mais avoir avec lui un maton aux méthodes parfois peu Orthodoxe le rassurait. Avec ses mains, il plaça sa tête contre ses genoux et s’assoupit quelques instants. En fermant les yeux et se laissant aller à la fatigue. Une vibration se fit ressentir au niveau de son visage jusqu’à son buste. Une voix à l’intérieur lui insuffla :
- Ils arrivent dépêchent toi !
Il se réveilla brusquement.
- Gabriel, ils arrivent !
- Qui ça ? Qui te l’a dit ?
- Je ne sais pas une voix dans ma tête.
- Entre le vieux et ses histoires et toi ta tête, je suis bien loti !
- Lève-toi ; dépêchons-nous de sortir de là. On va passer par le souterrain, heureusement, par chance, j'ai changé le code ce matin, je n'ai pas encore eu le temps de le transmettre à l'équipe.
Gabriel et Marc sortirent de la salle des matons puis regagnèrent l'unité 3 en courant à toute vitesse. La porte donnant vers le souterrain était juste à côté des toilettes. Gabriel y passa son badge. Tous deux franchirent la porte donnant sur deux ascenseurs, à gauche hors service, il enclencha l’autre. Les portes s'ouvrirent lentement sur un corps pendu d'un autre surveillant.
Gabriel comprit avec stupeur que le souterrain avait été déjà visitée. Et qu'ils n'étaient en sécurité nulle part.
- Comment allons-nous faire ? Demanda Marc avec inquiétude.
Des petits pas se firent entendre au niveau du plafond. Gabriel comprit que ce n'était qu'une question de temps afin qu'ils ne soient pas cernés.
- On a plus le choix que de prendre l'ascenseur, il faut monter dans la voiture et s'en servir comme d'un bulldozer en fonçant droit sur eux tout ; tirant avec mon arme. En franchira la barrière, nous serons enfin de libre de partir de cet enfer.
Ils prirent l'ascenseur, retenant leur souffle devant cette vision d'horreur. Gabriel appuya sur le bouton - 1. L’ascenseur descendit lentement.
En arrivant au sous-sol, il ouvrit les portes sur un parking complètement désert.
Un crissement de pneus retenti à quelques mètres.
- Vite, notre véhicule est là-bas derrière la poutre ! Lança Gabriel.
Une lueur d’espoir gagna les 2 hommes qui ne firent pas attention à la plaque d’égout mal mise près du véhicule.
Gabriel posa son talon gauche sur la plaque et déverrouilla le véhicule, tandis qu’une main ensanglantée le saisi violemment par le pied et le fit tomber au sol. Se sentant en mauvaise posture, il laissa les clés parterre et essaya tant bien que mal de résister, mais rien n’y fait. Il tomba au fond de l’égout avec des tonnes de corps déchiquetés, pour y subir le même sort.
Marc se jeta sur les clés et rentra dans le véhicule en verrouillant toutes les portes, il tourna la clé, mais impossible de la faire démarrer.
Un frisson parcouru tout son corps en une fraction de seconde, il avait l’impression d’être gelé. Puis son regard croisa celui de Tony ensanglanté dans le rétroviseur et disparu.
Marc eut l’impression de devenir fou, une main s’agrippa contre sa gorge pour l’étouffer tandis qu’une autre pour le secouer. Il perdit connaissance.
- Alors on a fait un cauchemar ?
Secouant Marc pour le réveiller.
- Gabriel ! Tu n’es pas mort ?
- Oh ! Il t’a terrorisé le vieux ! Il ne fallait pas l’écouter ni t’endormir sur un film de la 1ère guerre mondiale.
Marc poussa un soupir de soulagement.
- Zzzzzzz Charlie pour Alpha 5, nettoyage du sang terminé Zzzzzzz.
- Reçu !