Ce texte participe à l'activité : Défi d’écriture « La liste »

Il faudrait que je descende à la cave ces trois bouteilles de bière qui traînent et puis que je me rase aussi et que je ne m'égare plus sur internet. Le temps que je perds sur Facebook, si je le passais à faire des choses utiles… Je pourrais avancer sur mon roman. Mais est-ce utile, écrire un roman ? Et l'utilité est-elle utile ? Ne serait-elle pas plutôt encombrante ?

Quand je serai à la retraite, je me limiterai à quatre heures d’écriture le matin — je suis du matin —, et puis deux heures de ménage et deux heures de bricolage durant l’après-midi, après la sieste. J'assurerai en plus le repas du soir et la vaisselle, à la main. Je n’ai jamais voulu qu’on ait un lave-vaisselle. Ce temps-là, je pourrai le comptabiliser dans le temps de ménage de l'après-midi, à la rigueur, si j’ai eu la flemme dans l’après-midi. Mais cuisiner le soir, ça, il faut que je m’y tienne pour alléger le fardeau de Luce ; elle ne sera retraitée que dans 13 ans, la pauvre ! Enfin, c’est peut-être moi qui suis à plaindre d’être déjà vieux…

Je pourrai aussi m’occuper du jardin quand il fera beau : arracher les haies, planter des hortensias sur les bordures, tailler le houx, arracher le framboisier près de la maisonnette et remplacer le lilas.

Mais surtout, surtout, il ne faudra pas oublier de m’enrichir. Pour écrire, si écrire est important, il faut ne pas s’appauvrir, ne pas faire le vide autour de soi, ne pas se couper des autres, sortir, voir des gens, vivre des situations — Plus elles seront rocambolesques, plus elles seront fécondes —, passer des soirées à discuter, boire des coups, s’enivrer, tomber amoureux, mais pas dans le sens habituel, tomber amoureux d'un moment, d’un patron de bistrot, d’un type qui te prend en stop parce qu’il ou elle nous rend heureux de vivre.

Et puis prendre des risques. C’est capital. Ne pas se perdre dans son petit confort, dans ses petites certitudes, dans son petit train-train, dans ses petites listes. Tout casser et recommencer.


Publié le 05/11/2025 / 6 lectures
Commentaires
Publié le 05/11/2025
C'est bien pénible de se voir trop souvent dans les textes des autres, bières à part. De bonnes résolutions ? Ce texte m'a évoqué d'anciens voisins aussi, de ceux qui, riches d'idées et tout prêts à les partager, restaient sur le canapé devant leur écran la majeure partie de leurs journées. Cordialement,
Publié le 05/11/2025
J'ai eu beaucoup de chance dans ma vie. Enfin, dans sa seconde moitié, celle qui commença le 13 avril 1999, lorsque j'ai rencontré Luce. A partir de ce moment-là, j'ai pris une décision que tous trouvèrent déraisonnable, quitter mon épouse que je n'avais jamais vraiment aimée pour me retrouver avec celle dont je venais de tomber amoureux, que je n'avais même pas encore embrassée. A partir de ce moment-là, la confiance que j'eus enfin en moi grâce à la confiance de Luce, me donna des ailes et j'osai enfin. J'ai marqué une pause professionnelle pour suivre des cours de batterie à Valenciennes. J'en ai marqué une seconde pour retourner à l'école apprendre ce que j'avais toujours aimé, le son. Mon diplôme en main, j'ai trouvé du boulot à Paris dans un endroit extraordinaire et j'ai tourné dans le monde entier avec un groupe qui aimait la façon dont je travaillais. Puis j'ai été engagé au théâtre de Namur où j'ai découvert un univers que je ne connaissais pas, loin de la musique, mais pas moins riche. Là encore, j'ai pu voyager, Afrique, Amérique, Europe. Si j'arrêtais d'être fou, si je devenais raisonnable, la passerelle magique qui va de Luce à moi s'effondrerait. En tout cas, j'ai décidé de déconner plus que jamais, une folie, me réconcilier avec l'humanité, me donner les outils pour l'aimer à nouveau, aller à sa rencontre. Je ferai mon tour de France à vélo, le printemps prochain et je logerai chez des gens que je ne connais pas. Le projet s'affine dans mon esprit. Ce sera une réalité. Je n'en doute pas. ;-)
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