Un ciel vide et un monde affublé de gnoses.
Un oiseau volait au loin, son gazouillis puissant était la simple représentation de l’Être au monde.
Elle avait lu des livres, des traités, l’histoire, pas mal de philosophie. Elle regardait les êtres, suivait les événements, observait la nature et les choses. Elle s’attardait sur les visages, lisait les tressaillements, décodait les expressions les plus fugaces et mettait des mots dessus.
Beaucoup de ses proches partirent et d’abord les siens immédiats, des êtres d’édification avec leurs forces et leurs faiblesses, leur richesse et leur dénûment. Ce fut des temps décisifs, mais l’extinction de leurs voix, la froideur de leurs corps après le silence méthodique et par paliers de leurs organes vitaux furent révélateurs. L’Homme est destiné à mourir. Il est dénué de tout pouvoir et ne possède aucune capacité d’agir sur la finitude.
Il a l’immense richesse de décider, jusqu’à une certaine mesure, de son segment, de sa tranche de vie, du temps qui lui est imparti, dans l’absolu et, en dehors de toutes considérations, de santé physique et psychique, de considérations sociales et pécuniaires multiples et variées. Mais cela est un autre sujet. L’existentialisme et la praxis, l’esprit d’entreprise et la volonté, la détermination et le cœur qui y est mis.
Le ciel est vide et ses composts sont autant de réponses très simples à ses interrogations enfantines pulsatiles et lancinantes. De la matière organique, des gaz, des mélanges hétérogènes, des fusions … Elle avait passé bien du temps à observer le mélange des matières, leur fusion, veillait à ce que les déchets ne soient pas gâtés, à ce que ses savants composts ne soient pas en contact avec la terre et malgré toutes ces attentions, le temps long, un chainon se produisait, de nulle part et de tout, et les vers de terre étaient au rendez-vous. Les outils de compréhension scientifique étaient peu approfondis chez elle et elle s’en remettait à la philosophie et à d’intenses perceptions personnelles. La Vie venait au détour de mille et une observations, d’une manière spontanée et inattendue, probablement laborieuse, silencieuse et infinitésimale.
Elle vit partir le second cercle familial avec la maturité. Et la douleur fut moindre, philosophique et compréhensible. Et elle prenait soin en échangeant avec ses amis impliqués dans ces questions métaphysiques, la boutade d’un parent chercheur : bientôt les cafards nous soigneront, disait-il, pour la faire révulser. Les médicaments du futur, ajoutait-il. Et devant sa mine déconfite, il précisait : ils seront policés, en poudre blanche, immaculée, dans des contenants pharmacologiques.
Une manière de voir les choses dans leur immédiateté, après transformation scientifique ici, sans le rejet primaire. Une sorte de regard neuf, dénué de cette épaisse couche sémantique qui rajoute du faux, du lourd et de l’invalidant.
Nous mourrons et c’est tout. Et c’est ainsi. Sous un ciel vide que les Anciens de pacotille ont alourdi de mythes, d’interdits et de grotesques. Les Anciens, 5000 ans derrière et, on leur accorde du crédit parce qu’ils sont aussi vieux que la mort à une échelle variable.
- Je construirai ma Vie, je L’emplirai et je m’EN délecterai gaiement, sans les miasmes des angoisses mortelles. Peut-être vivrai-je ce qu’il y a de plus beau ... Je m’y attelle.