Herbe verte

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Penché sur l’herbe grasse à mirer sa verdure,

J’avais devant les yeux comme un masque troublant,

Celui qui focalise en cachant la bordure

Et présente à l’envie un air de faux-semblant.
 

Mais au détour d’un brin, je vis une échaudure

Qui fit rompre ma foi sous ses roseaux tremblants.

C’est la preuve ! Me dis-je en fixant la clôture.

Le vent poussait au loin quelques nuages blancs.
 

Reculant, j’atteignis lentement la limite

Et me pris à rêver, moi l’isolé, l’ermite,

Que par-delà le mur, les prés seraient meilleurs.

 

Mais j’étais bloqué là, moi l’isolé, le moine,

Espérant sans savoir que je n’étais qu’un âne :

Que chercher ici bas si l’on se perd ailleurs?


Publié le 02/01/2025 / 12 lectures
Commentaires
Publié le 02/01/2025
C'est un joli poème où la question de l'acceptation de l'impuissance se pose. Elle est très actuelle, et montre également qu'il ne nous est pas toujours possible de faire ce que nous souhaitons, que nous sommes parfois contraints de nous adapter. Ce rêve d'un autre monde derrière les murs me rappelle l'auteur espagnol, du XXe siècle, Juan Ramón Jiménez qui, dans son Platero y yo (Platero et moi), imagine un monde naturel et pur derrière les barreaux d'une clôture, soulignant le désir de renouer avec la terre nourricière et la liberté. Le carcan dans lequel la société nous enferme est denoncé au travers de ce désir, un peu comme dans votre poème j'ai l'impression. Quant à la qualification (du poète ?) en âne je la trouve pertinente dans le sens où il est enfermé comme un animal dans son enclos. Cependant, l'âne est un animal très intelligent parce qu'il est têtu. Jamais il n'acceptera ce qu'on lui fait faire s'il ne le décide pas lui-même, et il a bien raison ! Tous ceci étant dit je vous souhaite une bonne année et encore des textes à écrire !
Publié le 02/01/2025
Je me suis régalé et du magnifique sonnet de Perthro, et de ton analyse, merci et bonne année Lucie.
Publié le 05/01/2025
Bonsoir Lucie, meilleurs vœux à vous aussi. Merci pour votre analyse pertinente de ce texte! J'avoue que je n'étais pas allé aussi loin et cela me fait plaisir de voir ce que quelques écrits peuvent susciter.
Publié le 06/01/2025
Bonjour Perthro, je suis contente que cela vous fasse plaisir de voir ce que votre écrit a suscité chez moi. L'évocation des doutes que l'être humain peut avoir au cours de sa vie est très intéressante, à tel point que j'écrirai peut-être un texte sur le même sujet, j'y poserai peut-être mon point de vue.
Publié le 02/01/2025
Bonjour et bonne année Perthro, et surtout un immense merci pour ce sonnet magnifique. A lire le sonnet est une petite merveille tant le rythme est agréable lorsque la précision est au rendez-vous, ce qui est toujours le cas avec tes créations . Et puis c’est fluide, c’est très difficile de permettre une narration aussi fluide avec toutes les contraintes liées aux réglés propres aux sonnets, et toi c’est comme si tu écrivais les sonnets comme tu respirais. C’est vraiment incroyable. Et puis enfin, le fond, je suis conquis depuis le départ sur ton fond d’écriture qui questionne sur le sens de la vie et qui mets en exergue la fragilité de l’humain dans ses innombrables et légitimes doutes. Que chercher ici bas si l’on se perd ailleurs », cette question est puissante pour toutes celles et ceux, nombreux je pense, qui se la pose. Merci Perthro !
Publié le 05/01/2025
Bonsoir Léo, meilleurs vœux à toi aussi! Merci pour ton commentaire. Ah, la fluidité.... J'avoue que c'est là quelque chose que je tente d'avoir à chaque ligne, en effet. Quant au sens, je me rends compte qu'effectivement, il a tendance à toujours être proche de ce sens de la vie et de sa fragilité, c'est vrai. C'est souvent aussi très introspectif je crois.
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