J'ai cent ans alors vous venez me voir parce que cent, c'est rond ! Vous aimez les choses rondes, n'est-ce pas, Messieurs les journalistes ? Quand c'est rond, court et simple, ça percute et c'est ce que vous aimez. Je me rappelle comment vous répétiez en décembre 1999 que nous allions changer de siècle parce que 2000, c'est chouette, parce que 2000, c'est rond. L'exactitude et la rigueur auraient exigé qu'on attende 2001, mais pourquoi s'embarrasser ?
Il faut vulgariser car le public est de plus en plus stupide, criez-vous. Mais c'est votre simplisme qui rend les gens crétins.
Il aura fallu que j'aie cent ans pour que vous veniez me demander mon avis, un avis dont vous vous moquez. Si, si ! Vous dites que non, mais je sais que si. Tout à l'heure, vous en ferez un papier complaisant qui ira dans le sens du poil. Vous oublierez ce que j'aurai dit de polémique pour ne garder que mes idées les plus mièvres auxquelles vous ajouterez votre saloperie de pitié, de bienveillance nauséabonde. Ce papier médiocre sera une perfection, du sur mesure pour votre feuille de choux où on lit en vain ce qui est inutilement écrit. Que pourrait-on vouloir de plus dans un Occident qui se mange la queue ?
Je vous propose une variante plus chouette ! Mes souvenirs, je vais me les garder car tout ce que je pourrais vous dire se trouve écrit dans les livres en papier, ceux qu'on trouve dans les bibliothèques et les librairies, de préférence écrits avant l'U.E. Je n'ai rien à vous apprendre qui ne s'y trouve pas. Je ne peux que vous exhorter à faire votre boulot de journaliste ! Cherchez les faits ! Faites fonctionner votre bon sens ! Ne marchandez pas vos idées !