Ah oui ! Il faut que je vous dise qu'ici à New York, le niveau de l'eau dans les cuvettes des toilettes est très haut. Pour le beau sexe, ça ne doit pas poser de problème, mais pour les garçons, c'est autre chose. J'ai failli me noyer hier. Il a fallu que je rattrape le naufragé par la peau du cou et que je lui tienne la tête hors de l'eau durant toute la durée de la croisière. Je ne sais pas comment font les Américains. Et c'est une question que je vais m'abstenir de poser. Je ne voudrais pas les désobliger.
Comment décrire mon impression dominante ici, à New York ? Les policiers, nombreux, que je croise dans la rue sont les mêmes que ceux que j'ai vu toute ma vie sur l'écran de ma télévision qui diffuse si abondamment séries et films américains, les voitures et les camions, c'est idem, le son des moteurs et des sirènes aussi, la désinvolture des passants, également. En rentrant dans un bar, on ne peut ne pas revoir mille images enregistrées par notre esprit lors des milliers d'heures passées devant des fictions U.S. L'éclairage tamisé, les écrans qui diffusent du base-ball, la taille des verres, la tête même des gars derrière leur bar, on les a déjà vus. Quand tu t'assieds, tu t'attends à voir débarquer à côté de toi, Clint Eastwood ou Matt Damon. Alors, ici, j'ai l'impression d'être passé à travers de l'écran. Je suis dans ma télévision. Dans le film de Woddy Allen "La rose pourpre du Caire" un personnage imaginaire rentre dans le vrai monde, ici, c'est moi qui rentre dans le cathodique. La fatigue en plus, ma réalité s'estompe et vraiment, je crois que hier, au cours de mes aller et retours de l'hôtel au théâtre, j'ai croisé cent personnages vus précédemment sur un écran ou l'autre. D'ailleurs, je me demande si le type sur le coin qui lit le journal n'est pas Tom Hanks...
J'adore New-York, comparable à l'épouse, agent immobilier d'American Beauty, son énergie et la lassitude qui l'accompagne son engagement pour atteindre le dérisoire. Derrière toute l'exubérance de la ville, on sent une immense lassitude. Les gens sur les trottoirs sont calmes, les joggers courent en souplesse, les voitures roulent au ralenti et même leur moteur émet un son plus grave que ce qu'on connaît chez nous. J'adore New-York ! Elle est touchante, vivifiante, fatigante, enivrante, humaine et dérisoire.