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Ce texte participe à l'activité : Fatale séduction

Une boule. Le rouge. Le vert. Le violet. Le fluo. Qui tourne. Les écrans. Musique qui frappe. Ça agite des bras. Les bouches s’ouvrent. Grimacent. C’est dingue. Qu’est-ce que je fais là ? 

“Elle est pas cool cette joie ?” Je me sens stupide. J’avale cul sec. Elle me prend l’bras. “Allez, viens on danse !” Je lui dis que je la rejoins. Je me dirige vers le bar. 

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Juste un quart d’heure con d'intégration prévu avec l’équipe. Genre tu casses à plusieurs des verres des assiettes. Tu resserres les liens, relâches la pression. 

Un “rage room”. Un brisé recyclé. Sauf quand la drh tilte sur une date d’anniversaire et décide de prolonger. En l’occurrence : ma date. Mon anniversaire. 

“Allez, on bosse pas demain". Et c’est la sortie en boîte. Et la galère pour la fille timide que je suis. Courage. Je joue le jeu. Je souris telle l’imbécile. 

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J’arrive au bar. Je demande une vodka. J’entends une voix derrière moi. On me couvre les yeux. Et dans ma bouche un goût subi, âcre, une impression de fer.  

À mon oreille, elle me dit. Tu ne t’appartiens plus. Déploie tes armes. Séduis-le. Tu sauras. Tu le rendras fou. Dans un mois tu t’en débarrasses. 

J’ai trop bu. Dans la surprise, le verre qu’on vient de servir tombe, casse. Et à côté : "Un autre svp. C'est pour moi." C'est lui. Je lui souris. Tentatrice. 

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“Cette fille c’est une bombe ! Elle te demande rien, une tigresse au lit, tu pars direct après. Elle remet ça tous les soirs, le plan parfait. Allez j’y vais j’suis pris.” 

Il sort du café. Il les laisse eux et leurs rires bourrés d'ironie. Ils imaginent même pas. Dès la première nuit il a rien compris. Il l’avait repérée dans la boite direct.  

Il était au bar. Regard en chasse. À une table, fille discrète yeux fuyants à peine à l’aise. Comme il les aime. Sans qu'il bouge elle s'amène. Demande un verre. 

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Et le truc de folie. Elle le renverse. Il lui en offre un. Elle se tourne. Genre femme fatale. 

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Un mois. Il sonne. J’ouvre. Lui mordille les lèvres. Ma langue doucement. Il entre. Je le sens. Fou de moi. Je souris. Excitée déjà. Agenouillée devant lui. 

Il me regarde. Partout. Les yeux pleins - extase. Enflure de mon ventre. De mes cuisses. Mes tétons. Et mes fantaisies. Il me fait baisser les mains. 

Je prends en pleine bouche ce qu’il ne raisonne plus. Je cherche à me relever. Il désespère. Je prends pitié. Un bruit il jouit. Et je me délecte. 

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Il s’est assoupi. Tu lui dis “reste cette nuit”. À son tour de sourire. Il dort. Tu poses la main sur son torse. Son cœur. Nu. Si tu t’attaches à son battement... 

Tu te lèves doucement. Le tiroir. Des verres brisés. D’un miroir. Tu en prends un au hasard. Tu retournes près de lui. Tu te blottis. Et tu entailles sa gorge. 

 

« Disons-nous que nous sommes tous fous, cela expliquera bien des mystères humains, cela résoudra bien des énigmes. » Mark Twain 

 


Publié le 14/02/2022 /
Commentaires
Publié le 14/02/2022
J'ai été tout de suite happé par le récit, puis, j'ai souri lorsque tu parviens à déjouer ce que j'ai voulu aussi éviter mais différemment. Je m'étais mis à la place du "séduit" pour ne pas être détestable. Ici, la séductrice parvient à être avec nous parce qu'elle se trouve piégée comme on l'est tous. Alors, j'ai adoré la photo d'entreprise ! Tout va très très vite. Le rythme est soutenu mais il m'a paru toujours parfaitement adapté. La ponctuation, souvent singulière ou absente, m'a parfois un peu gêné durant le slalom. j'ai occasionnellement aussi un peu galéré pour saisir le sens de certaines phrases. Mais cette confusion est sans doute recherchée et participe à l'ambiance de chaos général très à propos ici. Bizarrement la finale ne m'a pas éloigné de "la fille timide". C'est peut-être même le contraire qui s'est produit. Défi super bien relevé selon moi. Bravo !
Publié le 16/02/2022
Oui, dsl pour la ponctuation, tu as pu voir dans tous mes textes, je joue beaucoup avec elle ! Je regrette si cela m'éloigne un peu de vous, je vais travailler là-dessus :)
Publié le 15/02/2022
Eh bien, ma chère Allegoria, quel texte troublant, avec ce rythme qui est le tien, cette patte qui s'accapare des mots, leur tord souvent le cou. Il y a beaucoup de choses dans ce texte, les deux versants d'abord, la sensualité, le désir, l'amour, la folie et la mort. Des bris de miroir à la place du pic à glace :). Le basic instinct de notre Allegoria.
Publié le 16/02/2022
Oui un exercice - séduction fatale - qui m'envoie bien loin de mon ciel. Mais c'est clair : je préfère le bris de miroir au pic à glace :)
Publié le 15/02/2022
La menthe religieuse ici transformée en l'amante religieuse. Je ne m'attendais pas du tout à cette fin tu m'as surprise mais j'adore. Cette jeune fille timide, effacée que l'on n'imagine pas une seconde capable d'un tel geste! Joli rythme joli travail Bravo ally!
Publié le 16/02/2022
J'aime "l'amante religieuse" :)
Publié le 16/02/2022
Bravo Allegoria, la chute est inattendue et la citation de Mark Twain finit de tout exploser. J’ai trouvé l’amorce avec la “rage room” et la sortie entre collègues très porteuse et originale. On comprends d’autant avec la fin que cette rage est souvent bien enfouie. Et puis toujours ce style incisif et efficace qui révèle des personnages aux failles bien réelles. Merci, c’est super.
Publié le 16/02/2022
Tu as le don de percuter en tout - ou presque tout ;)
Publié le 16/02/2022
Les flashs de la boule qui tourne. Je vois, je vois plus. Je vois rouge, je vois bleu... Les flashs du verre en trop. Comme des bribes de souvenirs. Tentative de maintenir coûte que coûte la distance, pas d'attachement. T'es là, t'es plus là. Boum. Merveilleux respect de la chute. J'ai aimé le double point de vue, celui de la fille, puis celui du gars. Bravo Allegoria.
Publié le 16/02/2022
(dsl je me permets le Véro, mais je reviendrais au Véronique sans pb). Je suis touchée par les flashs. On écrit on envoie. Et que près de nous (plus encore qu'à côté ou qu'en face) on note. C'est combien bon :) Merci mille fois :)))
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