Le réveil de Gaïa
Mystéria, 1900.
Une île, au milieu de l’océan. Mais une île puissante, rayonnant sur le monde entier, de par sa richesse matérielle, intellectuelle, et spirituelle.
Au cœur de cette immense ville réputée partout de par le monde, les plus grands progrès technologiques et scientifiques s’affichent avec l’orgueil de la prouesse humaine :
D’abord la conquête des mers et océans, grâce aux bateaux, sous les applaudissements émerveillés des citoyens emplis de fierté.
Ensuite, celle du ciel avec le décollage du premier avion applaudi à grands bruits de « ah ! », de « oh ! », de « bravo ! », de « c’est incroyable ! ».
Puis finalement, celle de la Terre, quand les scientifiques et ingénieurs décident secrètement de creuser sous terre un réseau d’immenses tunnels baptisés « le labyrinthe ».
C’est donc au cœur de ce labyrinthe que se trament, dans le plus grand silence, différentes recherches destinées à améliorer la vie des hommes, tant sur le plan scientifique que technologique.
Ces chercheurs, en creusant ainsi en dessous de la ville, n’omettent pas, évidemment, de se servir au passage, s’emplissant les poches d’or, d’argent et d’autres métaux précieux.
Un immense réseau se crée et s’étend ainsi de jour en jour, abritant bientôt les esprits les plus cultivés du monde, les moins humbles également, et surtout les plus cupides.
Pourtant, quelque chose semble échapper au raisonnement si éclairé de tous ces chercheurs.
En effet, au fur et à mesure que le labyrinthe avance, la terre se met à trembler : d’abord par instants, puis sur de plus longues durées et plus fréquemment.
Des séismes de plus en plus forts se font ressentir en surface.
« - Ecoutez Gaïa ! La Terre tremble ! Gaïa nous avertit ! Un danger nous menace ! », préveint alors Kyor : prophète pour les uns, fou pour les autres, écouté religieusement par les croyants de cette ville et du monde, décrié par les plus cartésiens.
Pourtant, cette fois, tous semblent l’écouter avec attention.
En haut, la peur, voire la panique, commence à s’emparer de la masse.
Les aristocrates de Mystéria décident rapidement de fuir.
Les gens du peuple, eux, se retrouvent coincés sur cette capitale du monde isolée en pleine mer.
Les chercheurs, quant à eux, continuent inconsciemment leurs études au creux de la terre, creusant le labyrinthe toujours un peu plus profondément, recherchant continuellement de nouvelles matières premières et de nouveaux minéraux miraculeux…
Mais Gaïa, Mère Nature, n’en peut plus de se faire dérober ainsi ses richesses par ceux qui sont en train de l’exploiter sans l’ombre d’un regret.
Elle multiplie donc les avertissements.
Les séismes se succèdent.
Gaïa décide même de réveiller le volcan de Mystéria, déversant sa colère à travers la lave de celui-ci, ravageant les villages bâtis aux alentours, brûlant les terres cultivées, chassant la faune de l’île, délaissant les hommes, lassée par leurs vols, par leur irrespect, par leur dédain et leur prétention.
Mystéria se voit alors très vite plongée dans la famine et la dénutrition qui l’accompagne.
En haut, le taux de mortalité ne cesse d’augmenter, de mois en mois, de semaines en semaines, de jours en jours, disséminant un à un les gens du peuple encore debouts.
En bas, la vermine scientifique et industrielle prend soudain conscience de la gravité de la situation, sans toutefois comprendre l’impact qu’elle a eu dans cette destruction massive…
Ces nuisibles quittent donc, à leur tour, le labyrinthe et l’île, pour se mettre, eux aussi, à l’abri de la colère de Gaïa.
Le reste du monde assiste alors, indifférent, à l’extinction de la plus grande civilisation connue de ce monde.
Mais bon, qu’importe : le malheur des uns faisant le bonheur des autres, une autre grande puissance intellectuelle et matérielle naîtra de cette funeste tragédie…
La nouvelle puissance ainsi créée des cendres de l’ancienne répétera-t-elle la même Histoire, ou bien les Hommes entendront-ils enfin la voix de Gaïa ?