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En regardant la mer avaler l’horizon
Le marin effrayé par le bruit de l’écume
Enfonce un premier cri dans le fer d’une enclume
Dont la peau de satin exhale du poison.
 
Une mousse de cire au bout d’un long tison
Coule comme du miel enrobé de bitume
Et cache sous sa griffe un écrin d’amertume
Où meurent les espoirs par pure trahison.
 
Le sel descend du ciel sous un brouillard de rouille
Qu’un souffle de salive habilement dépouille
De la saveur d’un cœur ébahi par l’orgueil.
 
Car au dernier regard posé sur la nacelle
Il comprend que jamais il ne reverra d’elle
Que de soudains débris devenus son cercueil

 

Francis Etienne Sicard Lundquist

Soierie de marbre @2014
 


Publié le 17/11/2024 / 6 lectures
Commentaires
Publié le 17/11/2024
Woaw, ce poème est d’une efficacité redoutable. Les évocations sont lourdes (enclume, poison, tison bitume etc…) et ponctuent chaque vers, jusqu’à clouer à l’image des clous le cercueil. Techniquement et poétiquement c’est très fort.
Publié le 17/11/2024
Merci Léo pour ce commentaire si généreux ! Le monde dans lequel nous nous endormons, celui des rêves mais aussi celui des cauchemars nous apprend beaucoup de notre redoutable besoin de connaître la mort. Je me souviens de cette nouvelle d'Edgar Poe, qui raconte l'histoire d'un bateau aspiré par un immense courant dans les profondeurs de la mer. Est-ce une imagerie que l'on retrouve dans celle des trous noirs, que les hommes de science considèrent comme des portes de passage dans d'autres univers ? Est-ce tout simplement notre embellissement de la mort ? Est-ce encore ce besoin de voir, comme si la cécité excluait l'humanité tout entière de son destin ? Alors, les mots, toujours les mots, nous apportent ces milliards d'images dont nous avons besoin pour exprimer ces notions si profondes, dont nous sommes la plupart du temps peu conscients. Mais le poète, lui, brasse ces mots, comme les confettis d'une éternelle fête de la joie que nous ressentons devant le don inexplicable du langage. En plongeant dans la poésie, nous entrons dans le laboratoire de la parole, et comme des alchimistes, les poètes créent des bulles de mondes dans lesquels nous reconnaissons parfois des bribes de nos vies, mais qui souvent nous entrouvrent des univers insoupçonnés. Merci encore une fois Léo pour ta grande fidélité et surtout pour ta générosité à me proposer d'innombrables réflexions autour de la littérature. À plus tard Léo, cordialement, Francis Étienne. Sous un masque de pluie une ombre se faufile Entre les fils nacrés d'un verset de Virgile.
Publié le 19/11/2024
Ce poème donne à voir des images très fortes, il fixe la puissance de la mort dans ses lignes. Nous pensons à la mort parce qu'elle nous fait peur avec son caractère inévitable, nous parvenons difficilement à l'accepter, elle nous apparaît comme une épée de Damoclès au dessus de la tête. Son lien avec le vocabulaire maritime me rappelle que la mer était un cercueil pour les prisonniers du Château d'If, dont les cadavres, attachés à un boulet, finissaient dans les fonds abyssaux (comme Dumas nous le rapporte dans l'excellent Comte de Monte-Cristo). Ce poème est superbe techniquement car il fige une image marquante pour le lecteur.
Publié le 19/11/2024
Merci Lucie pour votre magnifique commentaire philosophique et l'appréciation bien entendu de ce poème. La mort est présente dans la vie et lorsqu'elle paraît inévitable son image se définit. Dans ces quelques lignes vous avez mis en valeur le lien qui peut exister entre naufrage et la mort, lien qui est sous-jacent bien entendu à la composition de ce texte. Votre exemple du Comte de Monte-Cristo est un magnifique exemple de la renaissance à travers la cérémonie de la mort, car il s'agit bien d'une cérémonie, qu'elle soit au cœur même d'une église, au à bord d'un vaisseau, ou comme vous le citez au château d'IF. La poésie est parfaitement destinée à l'expression de la mort, parce qu'elle utilise les mots sous lesquels nous glissons tous notre perception de la vie est bien sûr de la mort. Merci beaucoup encore Lucie pour votre excellent commentaire et j'espère à très bientôt. Cordialement, Francis Étienne.
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