Louis a onze ans.
Il ne parle pas beaucoup, mais il pense fort.
Chaque matin, il enfile son sac d’école,
et, sans qu’on le voie, il soulève aussi l’autre,
celui qu’il ne quitte jamais, même quand il dort.
Ce sac invisible, il ne sait pas quand il a commencé à le porter.
Peut-être le jour où il a compris que les adultes ne voient pas tout.
Dedans, il y a des choses qu’il ne sait pas nommer :
des colères qui piquent,
des questions sans réponse,
et des souvenirs qui s’accrochent comme des miettes au fond d’une poche.
Mais il y a aussi des choses belles.
Des moments minuscules qu’il garde précieusement :
le bruit de la pluie sur la vitre,
le goût du chocolat chaud après le foot,
le regard fier de la maîtresse quand il a osé lever la main.
Louis avance, un peu penché,
comme s’il apprenait à équilibrer tout ça.
Il ne veut pas qu’on l’aide,
il veut juste qu’on le voie vraiment.
Qu’on remarque quand il fait un effort,
quand il retient une larme,
quand il sourit malgré tout.
Un jour, à la sortie de l’école, son père lui demande :
— T’as passé une bonne journée ?
Louis hésite, puis répond :
— Oui, un peu lourde, mais bonne.
Et son père rit sans comprendre.
Mais Louis, lui, sait.
Il sait que son sac invisible ne disparaîtra pas,
qu’il fera partie de lui,
comme une mémoire qu’on apprend à ranger.
Et il sait aussi que, certains jours,
il sera plus léger,
parce qu’il aura trouvé des raisons d’y mettre de la lumière.✨️