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Les fleurs du mal, de Charles Baudelaire
LXXXII - Le goût du néant

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LE GOÛT DU NÉANT


Morne esprit, autrefois amoureux de la lutte, 
L’Espoir, dont l’éperon attisait ton ardeur, 
Ne veut plus t’enfourcher ! Couche-toi sans pudeur, 
Vieux cheval dont le pied à chaque obstacle butte.

Résigne-toi, mon cœur ; dors ton sommeil de brute.

Esprit vaincu, fourbu ! Pour toi, vieux maraudeur, 
L’amour n’a plus de goût, non plus que la dispute ;
Adieu donc, chants du cuivre et soupirs de la flûte !
Plaisirs, ne tentez plus un cœur sombre et boudeur !

Le Printemps adorable a perdu son odeur !

Et le Temps m’engloutit minute par minute, 
Comme la neige immense un corps pris de roideur ;
Je contemple d’en haut le globe en sa rondeur, 
Et je n’y cherche plus l’abri d’une cahute !

Avalanche, veux-tu m’emporter dans ta chute ?

 

Publié le 03/09/2025 / 2 lectures
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